16 octobre, 2008

Entre les Murs ***


de laurent cantet avec francois begaudeau

Une année scolaire dans une classe de 4ème de collège difficile à Paris, autour de Francois, prof de français

L'ombre de la Palme d'Or de Cannes 2008 est plutot pesante. On se demande forcément, même si la question est bête, "est ce mérité ?". Pas facile. On est loin de l'erreur historique de "fahrenheit 9/11" de Michael Moore, en 2004, Palme contre toute crédibilité artistique. Mais un film aussi délibérément simple et direct que "entre les murs" n'a pas forcément besoin de ce type de piédestal. Pas la peine de chercher une consécration / provocation. Son superbe premier film, "ressources humaines" aurait mieux fait l'affaire. Il a en tout cas la qualité évidente de bien plus marquer l'esprit qu'on ne le pense, aprés 2 longues heures pendant lesquels on s'ennuie parfois, sortant de certaines scènes, on ne suit pas le film comme un autre. Et pourtant, ça bouscule, fortement, longuement. Cantet est suffisamment fin -on le savait- pour éviter deux pièges : le film minimaliste d'une part, car il y a un gros travail de mise en scène, impressionnant par sa discrétion justement, jamais rien de trop dans l'image ou le jeu des acteurs. Et, d'autre part, le discours bien pensant, on dira "progressiste", pour sortir un cliché. On sort plus inquiet que rassuré, c'est bien la réalité de l'école d'aujourd'hui, d'une génération d'ados "métissée", que l'on fréquente en permanence, extremment crispante par son comportement prévisible et bourrin tout en étant attachant parce que tout reste à faire. Les mêmes de cette classe quelques années aprés, adultes, on s'en fout, tant pis pour eux. à 13/15 ans, on a encore envie de penser que tout n'est pas écrit. C'est tout cela que transmet ce film, une réalité tellement banale, tellement désespérante par ce qu'on voit et devine, que c'en est saisissant, car ce n'est pas un documentaire, il n'y a pas de triche. Begaudeau joue son role de prof, pas du tout parfait, pas du tout héros, qui se plante aussi malgré son éloquence, et qui s'enferme dans certains échecs. Un film sur la pédagogie, comment faire, comment s'en sortir, comment convaincre sans lachetés ou artifices. Avec cette identification avec Begaudeau, inévitable, que ferait-on à sa place ? Ce n'est pas une grande oeuvre, beaucoup passeront à côté, avec raisons, car il y a peu de tensions, une trop forte concentration sur la salle de classe peut-être, un peu de "autres décors/autres personnages" aurait fait du bien. Mais il y a toujours cette justesse, situations souvent rageantes, ou drôles, mais pas du tout distrayantes.

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